Greve Pro Santé

Chers patients, chères patientes 


Noyé au milieu de la réforme des retraites, nos soins tels que nous les connaissons sont également en voie de disparition.

Dans un silence assourdissant, l'État va entériner une égalité d'accès à des soins d'inégale qualité pour tous.

 

Petit résumé des réunions de « négociation » (ou plutôt d'exposé du plan) avec la Sécurité sociale : 

Les médecins libéraux demandaient une revalorisation de leur chiffre d'affaires (pas de leurs revenus) pour pouvoir embaucher du personnel, investir du matériel de meilleure qualité dans leur cabinet, se former...

En 10 ans, nous sommes passés de 23 a 25 €, moins que l'évolution de l'inflation.

 

La réponse de la sécurité sociale (donc du ministre) : "on augmente la consultation d'1,5 € pour les 5 prochaines années, en 2024 (moins que l'inflation de 2022). 

 

Si ce projet est acté fin février, il faut vous attendre à des déconventionnements massifs ou un changement d'activités des médecins généralistes (salariat, esthétique etc...) qui préféreront assurer la qualité et la sécurité de leurs soins plutôt que la quantité. Ce qui veut dire que la Sécurité sociale pour laquelle vous êtes obligés de cotiser ne remboursera plus que 0.61 € de votre consultation qui passera à un minimum de 50-60 € (pour compenser de nouvelles charges si nous sommes contraint de nous déconventionner), remboursés par certaines mutuelles uniquement.

 

Travailler en déshumanisant la santé n'a aucun sens : notre fonction n'est pas que de guérir des rhumes mais parfois seulement de soigner... et de prendre du temps avec nos patients.

 

Ces dispositions – si elles sont actées – laisseront donc place à une médecine à deux vitesses dans notre pays :

Une médecine conventionnée (remboursée par la sécurité sociale) : des consultations médicales avec du délai pour une durée de 5 à 10 mn, puis un suivi par infirmier ou pharmacien, avec tous les risques sanitaires que cela implique.

Une médecine non conventionnée (non remboursée par la sécurité sociale) : des consultations médicales avec moins de délais, adaptées à vos besoins, avec un suivi médical, mais au coût plus élevés pouvant représenter un frein à l’accès aux soins.

 

L’État souhaite que sur le papier tous les français aient un médecin (coucou la démagogie alors que rien n'est fait pour donner de l'attrait à l’installation).

Les médecins souhaitent la même chose, sans impacter sur la qualité des soins de leurs patients qui doivent pouvoir consulter leur médecin.

 

Nous nous mobilisons contre cette perspective de modèle de santé !



La revalorisation de nos tarifs à la moyenne européenne, remboursés, sans « primes », motivera l’installation de nouveaux médecins répondant immédiatement à la pénurie médicale ; permettra d’investir dans nos cabinets, notre formation et de salarier nous-même secrétaire et/ou assistant médical afin de mieux vous soigner.

Plus que jamais, votre soutien est important.



             

Les politiques de santé ont mis à mal notre système de santé ces dernières décennies. Vous éprouvez de plus en plus de difficultés pour accéder aux soins. Nous en sommes conscients mais pas responsables. Il y a eu la baisse du fameux numerus clausus dans les années 80 et 90. Il y a maintenant un manque d’attractivité de la médecine libérale qui « tue » les vocations des jeunes. Le nombre de médecins va continuer de diminuer pendant les dix prochaines années. Le gouvernement vient de passer en force avec le 49.3 la quatrième année d’internat (10 ème année de médecine) afin d’envoyer les internes dans les déserts médicaux.

Cela ne résoudra pas la problématique car les médecins seront toujours aussi peu nombreux et que les déserts médicaux sont partout. Au contraire, cette contrainte supplémentaire risque d’en décourager une partie qui pourra abandonner médecine, exercer en salariat, s’expatrier.

Nous concernant, médecins libéraux installés, le projet 2023 est de nous reléguer au rang d’animateur d’une équipe de soins. Nous nous chargerons des cas les plus complexes rémunérés sans peu de changement par rapport à la situation actuelle (25€) tandis que les autres professionnels (pharmaciens, kinés, infirmiers) se chargeront des cas les plus simples. Si délégation de tâches il y a, elle doit être à l’initiative du médecin et chaque professionnel doit être responsable de ses actes.

Nous avons formulé de multiples propositions qui permettraient d’améliorer l’accès aux soins. Nous ne comprenons pas les rédacteurs du projet actuel restés hermétiques à toutes les suggestions issues du terrain. Nous pensons qu’à l'inverse, leur projet réduira la qualité des soins et diminuera encore l’attractivité de notre profession. Nous serons conduits à mener des actions dans les semaines à venir avec l’objectif de sauver ce que nous considérons comme notre vocation.

Nous demanderons de fortes revalorisations de l'acte de consultation pour se rapprocher de la moyenne européenne, au moins au niveau de ce que l'assurance maladie propose de verser aux infirmiers en pratique avancée : 50€. Cette revalorisation nous permettra d'embaucher du personnel, d’investir dans du matériel, de nous former davantage. Tout ceci nous permettra de suivre plus de patients (donc moins de patients sans médecin, moins d’attente pour un rendez-vous). Cette revalorisation motivera les jeunes médecins à choisir l’exercice libéral.

Nous nous proposons également de renoncer à des subventions et forfaits versés par les instances de plusieurs dizaines de milliers d’euros que nous touchons chaque année. Ces subventions constituent principalement des effets d’aubaine, n’améliorent pas l’accès aux soins ni leur qualité. Il faut ajouter que ces subventions et forfaits structure, ROSP, CPTS, MSP, PSLA etc. qui n'ont jamais fait la preuve de leur utilité médicale, génèrent une surcharge de travail administratif qui nous fait perdre beaucoup de temps et donc nous empêche de suivre plus de patients. Il nous semblerait plus opportun d’investir dans le soin et les soignants eux-mêmes.

Devant l’absence d’écoute, de plus en plus de médecins parlent de se déconventionner de l’Assurance Maladie, c’est-à-dire que leurs tarifs seront librement fixés et que vous ne serez pas du tout remboursés par l’assurance maladie en allant les consulter. Or, nous sommes attachés à l’égalité d’accès aux soins et ne voulons pas de ce modèle de santé à deux vitesses en France. Nous luttons pour vous dans ce but.


Je pensais vous devoir ces explications sur cet enjeu. Je tenais aussi à vous remercier car vous êtes notre force et notre principale considération.


Votre médecin,



Mis à jour le 08 Mars. 2023